CESTI/AMBASSADE DE FRANCE AU SENEGAL

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mardi 20 octobre 2015

La transition énergétique au Sénégal place l’Etat devant ses contradictions

Afin de satisfaire la demande croissante du pays en électricité, l’Etat du Sénégal, dans sa politique énergétique mixte, continue à accorder une part belle aux énergies fossiles via la construction des centrales à charbon.
Cela, en dépit de nombreuses potentialités dont il dispose en matière des énergies renouvelables et le respect des normes environnementales devenu un enjeu majeur à l’échelle planétaire. 

«Le gouvernement sénégalais est contradictoire. D’un côté, il reconnaît avoir d’énormes potentialités en matière d’énergies renouvelables et de l’autre, il veut développer 11 centrales à charbon » alors qu’elles sont fortement émettrices de gaz à effet de serre.Le constat dressé par Aissatou Diouf, experte des questions environnementales, est sans appel.
La centrale à charbon de Bargny, localité située à quelques kilomètres de Dakar, est un reflet de cette contradiction qui voit le gouvernement sénégalais continuer à investir dans les énergies fossiles.
Autre exemple, cité par Gouré Niang, conseiller technique du Directeur de l’Agence nationale pour les énergies renouvelables : « L’Etat sénégalais importe beaucoup de produits pétroliers, qui coûtent très cher et qui sont très polluants. »
Pourtant, le Sénégal ne manque pas de sources d’énergies renouvelables : le solaire, l’éolien, l’hydrolien (énergie issue des courants sous-marins), la petite hydraulique (issue de la chute d’eau et des débits des cours d’eau), ou encore la biomasse (issue des produits végétaux et animaux). Plusieurs études menées dans le pays ont démontré que l’exploitation de tout ce potentiel permettrait de produire une quantité d’énergie considérable, ce qui pourrait atténuer de manière substantielle la dépendance du Sénégal aux énergies fossiles.
« Ce qu’il faut aujourd’hui, prône Aïssatou Diouf, c’est investir dans ces énergies renouvelables, car les moyens sont là et la technologie est de plus en plus accessible. » Elle reconnaît que « des efforts ont été entrepris par l’Etat dans le cadre de la mise en place de l’ANER. Cette Agence nationale pour les énergies renouvelables a pour mission d’augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique sénégalais. Il existe également, poursuit-elle, l’Agence nationale pour l’électrification rurale, qui mène un travail sérieux en faveur de l’accès à l’électricité dans les zones rurales. »
Aissatou Diouf explique la réticence du gouvernement à aller plus loin en faveur des énergies renouvelables par des raisons politiques : « Ce qui peut freiner, c’est la politique. Investir sur le renouvelable, c’est faire un pari sur l’avenir, à long terme, alors que les élus ont un rendez-vous politique à gérer puisqu’il y a des élections tous les 5 ans ».
En outre, l’Etat est aussi soumis à la pression des populations dont les besoins en électricité sont immédiats et vont croissant.
Reste que l’Etat sénégalais s’est engagé à atteindre un taux de 20% d’énergie renouvelable dès 2017. Pour y parvenir, explique le Dr. Goure Niang, à l’ANER, « l’Etat veut  impliquer le secteur privé et les acteurs de la société civile. Il a aussi prévu de mettre en place des programmes de formation pour renforcer les capacités des techniciens dans ce nouveau domaine. »
Les autres voies à explorer sont identifiées par l’Etat. Reste à les mettre en œuvre plus rapidement : renforcement du cadre législatif et règlementaire pour les énergies renouvelables, amélioration des dispositions fiscales et douanières incitatives, encouragement de la recherche et de l’innovation  et concertation accrue entre les différents acteurs concernés (Etat, entreprises, collectivités locales et société civile).
Sans oublier le nerf de la guerre : trouver des sources de financement aussi bien au niveau national qu’international.
Pour Aïssatou Diouf, qui travaille aussi à l’ONG environnementale Enda, il faut également mener « un travail de sensibilisation de longue haleine vis-à-vis des communautés pour leur expliquer que le renouvelable, c’est le pari de l’avenir, de la durabilité. Investir dans ce domaine ne produira pas de résultats immédiats mais cela profitera à toute la population sénégalaise de façon durable dans les années à venir».
Mamadou Yaya Balde
(1)   L’Agence nationale pour les énergies renouvelables (ANER) a été créée en 2012 avec pour principale mission la promotion des énergies renouvelables au Sénégal tout en contribuant à l’augmentation de leur part dans le mix énergétique.




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