Afin de satisfaire la demande croissante
du pays en électricité, l’Etat du Sénégal, dans sa politique énergétique mixte,
continue à accorder une part belle aux énergies fossiles via la construction
des centrales à charbon.
Cela, en dépit de nombreuses
potentialités dont il dispose en matière des énergies renouvelables et le
respect des normes environnementales devenu un enjeu majeur à l’échelle planétaire.
«Le gouvernement sénégalais est contradictoire. D’un côté, il
reconnaît avoir d’énormes potentialités en matière d’énergies renouvelables et de
l’autre, il veut développer 11 centrales à charbon » alors qu’elles sont fortement émettrices de gaz à effet de serre.Le constat dressé par Aissatou Diouf,
experte des questions environnementales, est sans appel.
La centrale
à charbon de Bargny, localité située à quelques kilomètres de Dakar, est un
reflet de cette contradiction qui voit le gouvernement sénégalais continuer à
investir dans les énergies fossiles.
Autre
exemple, cité par Gouré Niang, conseiller technique
du Directeur de l’Agence nationale pour les énergies renouvelables : « L’Etat
sénégalais importe beaucoup de produits pétroliers, qui coûtent très cher et
qui sont très polluants. »
Pourtant, le Sénégal ne manque pas de sources d’énergies
renouvelables :
le solaire, l’éolien,
l’hydrolien (énergie issue des courants sous-marins), la petite hydraulique
(issue de la chute d’eau et des débits des cours d’eau), ou encore la biomasse
(issue des produits végétaux et animaux). Plusieurs études menées dans le pays
ont démontré que l’exploitation de
tout ce potentiel permettrait de produire une quantité d’énergie considérable, ce
qui pourrait atténuer de manière substantielle la dépendance du Sénégal aux
énergies fossiles.
« Ce
qu’il faut aujourd’hui, prône Aïssatou Diouf, c’est investir dans ces énergies
renouvelables, car les moyens sont là et la technologie est de plus en plus
accessible. » Elle reconnaît que « des efforts ont été entrepris par
l’Etat dans le cadre de la mise en place de l’ANER. Cette Agence nationale pour
les énergies renouvelables a pour mission d’augmenter la part des énergies
renouvelables dans le mix énergétique sénégalais. Il existe également, poursuit-elle,
l’Agence nationale pour l’électrification rurale, qui mène un travail sérieux
en faveur de l’accès à l’électricité dans les zones rurales. »
Aissatou Diouf explique la réticence du gouvernement à aller
plus loin en faveur des énergies renouvelables par des raisons
politiques : « Ce
qui peut freiner, c’est la politique. Investir sur le renouvelable, c’est faire
un pari sur l’avenir, à long terme, alors que les élus ont un rendez-vous
politique à gérer puisqu’il y a des élections tous les 5 ans ».
En outre,
l’Etat est aussi soumis à la pression des populations dont les besoins en
électricité sont immédiats et vont croissant.
Reste que
l’Etat sénégalais s’est engagé à atteindre un taux de 20% d’énergie
renouvelable dès 2017. Pour y parvenir, explique le Dr. Goure Niang, à l’ANER, « l’Etat
veut impliquer le secteur privé et les
acteurs de la société civile. Il a aussi prévu de mettre en place des programmes
de formation pour renforcer les capacités des techniciens dans ce nouveau
domaine. »
Les autres
voies à explorer sont identifiées par l’Etat. Reste à les mettre en œuvre plus
rapidement : renforcement du cadre législatif et règlementaire pour les
énergies renouvelables, amélioration des dispositions fiscales et douanières
incitatives, encouragement de la recherche et de l’innovation et concertation accrue entre les différents acteurs
concernés (Etat, entreprises, collectivités locales et société civile).
Sans oublier
le nerf de la guerre : trouver des sources de financement aussi bien au
niveau national qu’international.
Pour
Aïssatou Diouf, qui travaille aussi à l’ONG environnementale Enda, il faut
également mener « un travail de sensibilisation de longue haleine
vis-à-vis des communautés pour leur expliquer que le renouvelable, c’est le
pari de l’avenir, de la durabilité. Investir dans ce domaine ne produira pas de
résultats immédiats mais cela profitera à toute la population sénégalaise de
façon durable dans les années à venir».
Mamadou Yaya
Balde
(1) L’Agence nationale pour les énergies
renouvelables (ANER) a été créée en 2012 avec pour principale mission la promotion des énergies renouvelables au Sénégal tout en
contribuant à l’augmentation de leur part dans le mix énergétique.
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